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Arbre et Croix

Sélection de poèmes adaptés en français

Le haut plonge ses racines dans le bas

- Alexandre Grothendieck

  Le Mystère du Silence   
 (Anthologie de Lucian Blaga

  

Le sablier d’après "Ceasornicul de Nisip" (aphorismes)

L’univers est apparu il y a presque 14 milliards d’années dans un espace galactique traversé par les rayonnements cosmiques et brassé par des énergies phénoménales qui ont conduit à la naissance et à la mort d’innombrables étoiles par le jeu de multiples rotations, fusions, explosions, dispersant ainsi débris, poussières et atomes. De l’infiniment grand à l’infiniment petit et vice versa, de ces atomes agglomérés est né notre soleil qui a permis la synthèse de l’ADN et le foisonnement de la vie sous toutes ses formes. 

    

Nous sommes fait des poussières de l’Univers !

   

Mais Rien n’est dû au hasard : il y a une Intelligence, une Sensibilité, un Esprit qui fait que tout se fait et tout se fait en interconnexion avec le Tout car tout est lié. Ce qui symbolise le mieux ce lien universel, fondement de ce que nous sommes, c’est l’Arbre, silencieux, nourri par la terre, l’eau, l’air et le feu du soleil, enraciné entre le haut et le bas, protecteur du monde vivant et minéral.
En 1922, Lucian Blaga a résumé en trois aphorismes (parus dans la revue Gândirea sous l'intitulé "Ceasornicul de Nisip") notre place dans cette grande Aventure à laquelle nous participons sous la forme d’un "sablier" rempli des poussières dont nous sommes, laissant passer le temps que nous cherchons à fuir obsédés par la mort.

Je ne suis pas fils du bruit d'après "Fiu al faptei nu sunt" :

Dans ce poème, Lucian Blaga fait probablement référence à l’ancien et au nouveau testament: la première strophe se rapporte à Jean-Baptiste ou au prophète Élie, la deuxième strophe se rapporte à Adam et Eve. Dieu apparaît comme "Compagnon du Silence" et Jean-Baptiste l’a bien compris, contrairement aux autres prophètes ou apôtres qui ne font que rajouter du bruit au bruit créant un vacarme incompréhensible. Seul la Voix du Silence est Vérité et pour peu qu’on se taise et qu’on puisse méditer, restant à l’écart de toute propagande, on découvrira ce doux Murmure qui chuchote au fond de notre psyché: la Foi en soi.

   

Remarque: On retrouve cette notion d’Appel du Silence dans l’ancien testament (chapitre 19 - alinéa 12 du "Premier livre des Rois" mettant en scène Élie) où Dieu n’est plus présenté sous une forme spectaculaire mais, au contraire, apparaît comme "le Murmure d’une brise légère", c’est-à-dire l’opposé de la violence de l’ouragan, du tremblement de terre et du feu (cf. - alinéa 11 -).

Je ne suis que Silence d'après "Liniște între lucruri bătrâne" et "Amintire" :

Rémi Boyer disait de Lucian Blaga qu’il "n’est pas un théologien proprement dit, quoique fils de pope, ni apologiste de l’orthodoxie dont il se détache, car pour lui Dieu n’est que silence. Mais il reste fortement marqué autant dans sa philosophie que dans sa poésie, par la problématique et la sensibilité chrétiennes, tout en étant miné par le doute, et la force des mythes primitifs". 

   
Pour illustrer cette dualité, j’ai retenu deux textes extraits du recueil "marea trecere" qui est une interprétation poétique des écritures de l’ancien et du nouveau testament.

     
Dans le premier poème, "Liniște între lucruri bătrâne", Blaga évoque un accouchement remontant à la nuit des temps (la naissance du monde et son orogénèse?) puis la naissance d’un être vivant sous un ciel étoilé (Jésus Christ?). Dans cette allégorie, c’est une âme qui s’exprime (Dieu?), regrettant le temps de l’autre dimension (avant son incarnation dans le monde) mais rappelant aussi qu’il existe (dans ce monde) une connexion permanente au Silence apaisant et qu’il suffit de plonger ses pensées dans l’infini firmament étoilé pour en ressentir le bien être.

     
Dans le deuxième poème, "Amintire", un anonyme (Grand?) décrit un souvenir très ancien dont la seule évocation lui met les larmes aux yeux. La mélancolie est si forte que le rappel à ce souvenir lui est insupportable au point de devoir en effacer la trace pour pouvoir l’oublier. Là encore, c’est une âme qui s’exprime (Dieu?) dans un décor légendaire où les montagnes se hissent vers le ciel.

L’oiseau blessé d'après "Cap aplecat" :

"Cap aplecat", littéralement "tête inclinée", comme la position du Christ sur la croix. Ce poème me fait penser à un "oiseau blessé" perdu parmi les éléments (terre, vent, soleil, eau), bercé par le Silence de l’arbre enraciné entre le haut et le bas. Il évoque l'échec de celui qui voulait aider l’Homme à devenir ce qu'il aurait dû être mais qui n’y parvint pas. Mis à mort par ceux qu’il aimait tant, il disparut dans une autre dimension au dessus d’une planète abandonnée à son triste sort.

Un automne viendra d'après "O toamnă va veni" :

Un très beau poème d’amour de Lucian Blaga dédié à son épouse Cornelia pour le jour de son propre enterrement.

Pensées d’outre-tombe d'après "Gândurile unui mort" :

Les années sont passées depuis la mort du poète, enterré dans son village natal, dans la terre de ses ancêtres où pousse la vie parmi la mort, au pied d’un arbre qui défie le temps. Rien n’a changé dans l’absolu, ces lieux restent intacts en nature, seul l’homme les a quitté pour rejoindre la facilité des villes. Mais cela n’empêche pas les fleurs de pousser, repose en paix, toi le poète qui aimait tant ce pays malgré le mal qu’il t’a fait.

 

Selon Lucian Blaga, "ce qui est profond n'a pas d'éclat", en effet l’éclat ne peut être que superficiel et ne concerne que l’accessoire, pas le fondamental. Ainsi, il défendait les modes de vie ruraux respectueux des valeurs profondes de l’humain dans son environnement naturel, qu’il opposait à la superficialité des villes mécaniques dévorées par le faste de la modernité. Selon lui, la campagne est propice à la création artistique et à la méditation et, face aux grandes questions existentielles qui restent sans réponse, le plus sage est de se taire et de se fondre avec la terre comme le faisaient nos ancêtres villageois. Hélas, de plus en plus de petits villages difficiles d’accès sont abandonnés par les jeunes attirés par la modernité des villes. Seuls quelques vieux y survivent avec leurs souvenirs et leurs désillusions.

Apocalypse d'après "Peisaj Transcendent" :

Lucian Blaga transcrit les écritures du livre de l’apocalypse en reflétant surtout le drame environnemental de cette révélation. Je me suis encore plus éloigné de son caractère religieux pour aller à l’essentiel puisque la crise écologique est devenue réalité.

    
Pour évoquer la grande mutation sociétale qui se prépare avec l’émergence d’une nouvelle génération s’opposant à la folie du vieux système (à bout de souffle) dirigeant ce vieux monde depuis trop longtemps et qui a mis la planète à feu et à sang, je fais appel à l’aide du poète qui est le seul à pouvoir trouver les mots permettant de décrire la gravité de la situation.

    
Les civilisations du progrès technologique sont en déroute. Leur dieu imaginaire ne leur est d’aucun secours, pas plus que leur science illusoire. Le vacarme de leur propagande (pour nous cacher l’indicible) se mélange au cri de leurs "coqs apocalyptiques" (alias les médias) dans un discours de moins en moins audible et de plus en plus fou. Seul le "Bruit du Silence" (encore faut-il vouloir l’entendre) pourra nous soigner du mal qui nous ronge. L’homme est malade, la Terre brûle, les arbres s’éteignent mais déjà on voit poindre quelques oiseaux messagers (comme Greta Thunberg) venus nous réveiller.

Poèmes de Lucian Blaga interprétés par Ștefana Pop-Curșeu :

Pour la beauté des mots en langue roumaine mais aussi pour partager d’autres traductions, en langue française, des poèmes de Lucian Blaga présentés dans ce site, j’ai choisi cette superbe interprétation par Ștefana Pop-Curșeu de textes traduits par elle-même et par son mari Ioan Pop-Curșeu.

"L’âme du village" traduit en Français par Serge Fauchereau :

"L’âme du village", poème de Lucian Blaga, traduit du Roumain en Français par Serge Fauchereau, lu en Roumain par Valentin Sgarcea, illustré par des peintures de Georges Ramez, Nicolae Grigorescu, Camil Ressu, Georges Laugee, William-Adolphe Bouguereau, musique : Celestial Winds – "Ocean of Love".